Source LEFIGARO.fr 20 décembre 2017

Maladie de Lyme : 300 patients vont porter plainte au pénal

Après une première procédure civile, le collectif Lymaction porte plainte au pénal contre certaines autorités sanitaires.

La bataille judiciaire prend un nouveau tournant pour la maladie de Lyme. Le collectif Lymaction, regroupant 300 patients, devrait porter plainte en janvier pour «mise en danger de la vie d’autrui», «trafic d’influence» et «abus de bien sociaux», selon RMC. Cette plainte pénale vise les deux dernières ministres de la santé (Marisol Touraine et Agnès Buzyn), l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et le Centre national de référence (CNR) des Borrelia (bactérie responsable de la maladie).

En octobre 2016, ce même collectif, mené par les avocats Julien Fouray et Catherine Faivre, avait assigné en responsabilité civile cinq fabricants de tests Elisa (les tests prescrits en première intention dans la maladie) devant les tribunaux de Nanterre, Paris et Bobigny. Dans cette affaire, qui devrait être jugée au printemps 2018, les patients demandent une indemnisation, suite à l’utilisation de ces tests, jugés non fiables.
Des mesures suffisantes?

Désormais, avec la plainte pénale, les avocats questionnent: «Les tests de dépistage ne sont pas fiables. Alors, est-ce que les laboratoires sont incompétents? Ou s’agit-il du cadre réglementaire qui n’est pas adapté?» Autrement dit, les autorités sanitaires ont-elles pris les mesures nécessaires et suffisantes pour améliorer le dépistage de la pathologie? Non, selon les avocats des plaignants qui réclament «que des mesures d’urgence soient prises en retirant les tests du marché et en laissant la possibilité à d’autres techniques diagnostic d’émerger».

Problème: que faire en attendant? Les autres tests de dépistage de la maladie disponibles (goutte épaisse, recherche ADN ou encore test habituellement utilisé pour la tuberculose) n’auraient pour le moment pas montré une meilleure fiabilité que ceux utilisés actuellement (Elisa puis western-blot), selon Muriel Vayssier-Taussat, microbiologiste à l’Institut national de recherche agronomique (Inra). La bactérie loge dans divers coins de l’organisme, souvent difficile d’accès aux tests. Le manque d’efficacité des tests n’est donc pas dû à une mauvaise volonté des autorités…
Des tests peu efficaces

En France, il existe deux manières de diagnostiquer Lyme: soit le patient présente d’érythème migrant (caractéristique du premier stade de la maladie), soit les tests sanguins Elisa puis western-blot sont tous deux positifs. Ces tests détectent des anticorps – les soldats de l’organisme – de la maladie de Lyme dans le sérum du patient (un constituant du sang). Si, et seulement si, le résultat d’Elisa revient positif, un deuxième test, «western-blot» sera effectué. Et s’il est positif, le patient souffre de la maladie de Lyme.

Or ces tests sanguins sont critiqués, jusqu’au Haut Conseil à la santé publique. Selon ce dernier, trop de malades ne seraient pas détectés. Ainsi, la présence d’anticorps ne serait pas un bon indicateur de la maladie: d’une part, parce que ces anticorps ne sont pas présents à tous les stades de la pathologie et d’autre part, parce qu’une personne non malade peut avoir des anticorps spécifiques si elle a déjà croisé la bactérie. En outre, le nombre de souches de la maladie présent en France serait supérieur à celui présent dans le test.

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Le Ministère de la santé a lancé en 2016, un plan national de lutte contre la maladie de Lyme avec notamment pour objectif d’«améliorer les tests diagnostiques» mais également de «renforcer la surveillance et la prévention des maladies transmissibles par les tiques.»
La longue errance médicale

Certains patients errent alors des années avant de savoir de quoi ils souffrent. Or le diagnostic est la condition pour un traitement adapté à la pathologie. «Il s’est passé 9 ans sans que je sois vraiment diagnostiqué Lyme… Si j’avais été diagnostiqué dès le début, j’aurais eu au moins un traitement antibiotique», témoigne sur RMC Jérémy, un plaignant de 15 ans. Plus le traitement antibiotique est débuté tôt, moins le risque de conserver des séquelles est important.

La plainte, déposée en janvier, sera examinée par le parquet de Paris, qui décidera, ou non d’ouvrir une enquête, en vue d’un procès. Me Fouray résume: «L’action civile et l’action pénale sont deux procédures différentes, mais qui se complètent L’action civile concerne le dispositif de test biologique, qui n’est pas fiable. La plainte pénale c’est: comment en est-on arrivé là?»

par Aurélie Franc

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